Mon grand-père travaillait à la poste, un emploi très modeste dont le salaire lui permettait à peine de nourrir sa famille, mais il était aussi pompier-volontaire, ce qui lui valait un accès gratuit au théâtre de l'opéra où, debout dans les coulisses, il était censé prévenir les départs d'incendies. Venant d’Italie, il s'était établi à Douai, où il s’était marié et avait eu des enfants. Mon père n’avait que douze ou treize ans quand mon grand-père est mort, mais il se souvenait de l’avoir accompagné dans les coulisses du théâtre de l'opéra au moins une fois, pour une représentation de La Belle Hélène . Mon grand-père, venant de Naples, se dirigeait vers le nord, probablement vers la Belgique, peut-être la Hollande, et je me suis toujours imaginé qu’il s’était arrêté à Douai parce que cette ville était dotée d’un théâtre d'opéra à l’italienne. De fait, il était entré à la poste et j’ai cru comprendre qu’il était chargé d’installer les téléphones chez les particuliers...