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Articles

I’m just a lucky

Le moment n’est plus de se demander qui est de droite et qui est de gauche, mais qui soutient le réarmement économique et militaire de l’Europe et qui s'en tient au rôle de boulet. Voilà ce que Milot note, à la date du dimanche 2 mars, troisième jour après la rencontre explosive, dans le Bureau ovale, entre Volodymyr Zelensky et Donald Trump appuyé par le vice-président JD Vance.  À la même date, il note aussi: Le jardin Thiole est entouré de grilles, et je me doutais bien qu'un dimanche soir celles-ci seraient fermées. Mais il y a une allée étroite et sombre qui permet de contourner le jardin, que je comptais emprunter. Et, en arrivant à cet endroit, j’ai vu que ce passage était fermé, lui aussi, par une grille équipée d’un cadenas, ce qui m’obligeait à faire un détour par l’avenue Villermont. Et d’abord je me suis demandé si j’aurais la force de faire ce détour. Je revenais à pied de la brasserie Gaglio, sur l’avenue Jean Jaurès, j’avais traversé à pied une grande partie de...

Planétarium

  1. La façade était rébarbative. Une demeure perdue dans les collines, flanquée d’une tour arrondie, avec un toit pointu, comme un donjon. On l’appelait “Le Château des Ornières". L'intérieur était plus accueillant. Un grand hall avec des tentures aux fenêtres dont les couleurs et les formes géométriques rappelaient les tapis péruviens. Un buffet y était dressé, ainsi qu’une estrade sur laquelle des musiciens allaient et venaient pour installer leurs matériels. Pourquoi Gérard avait-il choisi cet endroit pour fêter le mariage de la plus jeune de ses filles? Avant d’en venir aux questions personnelles, ou pour éviter de le faire, il nous a expliqué que le bâtiment avait été construit sur la commande d’un aristocrate bavarois qui avait fui l’Allemagne à l’arrivée des nazis. Celui-ci ne l’avait jamais habité. En revanche, on se souvenait d’un de ses descendants qui y avait fait un assez long séjour dans les années 70. Il y vivait seul avec un domestique. Il roulait à moto. Souve...

L'église

J'étais parti trop loin. Après, il fallait revenir. Le pire, je n'étais plus tout à fait sûr de l’adresse de mon hôtel, ni même de son nom. J’avais dîné dans une taverne au plafond voûté. La lumière était insuffisante. Je voyais mal ce qu’il y avait dans mon assiette. Après, j’ai voulu marcher pour digérer ce repas trop lourd, et c'est ainsi que je me suis perdu. J'ai rencontré une fête foraine. Dans toutes les villes où je me suis perdu, je rencontrais les mêmes décors. C’étaient chaque fois des villes différentes mais les décors étaient toujours les mêmes. Avez-vous remarqué que, dans une ville, les tramways sont tous pareils, ce qui vous donne l’impression qu'il n'y en a qu’un, que c’est toujours le même? Quand il passe devant vous, il ne va pas très vite. Une allure de père tranquille. Les habitacles qui défilent dans la nuit n’abritent que de rares passagers qui somnolent. Et dans ce cas comment se peut-il que le même véhicule soit partout à la fois? J’ai ...

La honte (4)

Quand Bertrand et Walid se retrouvent devant la gare, déjà à la nuit tombée, quand Bertrand l’embarque dans sa voiture et qu’ils s’en vont ensemble, je ne sais pas où ils auraient pu aller ailleurs que là où ils sont allés. Bien sûr, c'était joué. Je ne sais pas ce que Walid lui aura dit pendant la brève conversation qu’ils ont eue, la veille au soir, au téléphone, quelque chose comme: “J’ai un couple d’amis qui peut m’accueillir chez eux, à Contes ou à Sospel. Un garçon que j’ai connu, qui s’est rangé. Si tu peux me conduire là-bas. Ensuite, je ne vous embêterai plus, mais sur la route tu me donneras des nouvelles des autres”. Et Bertrand, de son côté, a-t-il pu le croire une seule seconde? D’abord, quand il lui a parlé au téléphone, et encore quand il est monté dans la voiture, Walid n’a pas fait mention de leur destination réelle. De là où il le conduisait. C’est ensuite seulement, au tout dernier moment, comme ils traversaient le quartier de Bon Voyage et qu’ils s'apprêtaie...

La honte (3)

— Il prend la voiture de son père. Pourquoi? J’imagine que la vôtre était au parking?  — Il m’a dit que son père était malade. Qu’il l’avait appelé, qu’il avait besoin de lui. C'est le prétexte qu’il a trouvé. Et il est parti sur sa moto. — Vous l’avez cru? — Bertrand n’avait pas passé une seule nuit chez son père depuis bien longtemps. Mais pourquoi pas? Il ne m’avait jamais menti. Il a fallu cette fois. Et ce n'était pas pour retrouver une fille. — Entendu. Je comprends. Mais remontons quelques heures en arrière. Vous quittez votre bureau de l’avenue Thiers à six heures, vous revenez en tramway, et vous allez d’abord récupérer votre enfant chez votre mère, comme chaque soir. — Ma mère va chercher Paul à la sortie de l'école. S’il fait beau, ils vont goûter au jardin, puis elle le ramène chez elle. La vie n’est pas gaie à la maison, ma mère a besoin de moi, de cette visite que je lui fais chaque jour, Inès aussi. — Vous ne me parlez pas de votre autre frère. — Sofiane ne m...

La honte (2)

Amina occupe un poste important à la Mission locale. Au moment des faits, Hélène Barot, sa directrice, est à deux ans de la retraite, et elle compte bien qu’Amina lui succède à ce poste. Elle ne tarit pas d'éloges, la concernant. Elle dit que c’est la fille qu’elle aurait voulu avoir si elle s’était mariée et qu’elle avait eu un enfant. Voilà ce que dit le rapport. Bertrand, le mari d’Amina, est instituteur. Ils habitent ensemble dans le quartier des Moulins où ils ont grandi et où ils se sont connus quand ils étaient très jeunes. Les Moulins est, dans la banlieue de Nice, un “quartier sensible”, on dit aussi un “quartier prioritaire”. L’affaire s’ancre dans le quartier des Moulins, c’est là que tout commence, que tout se noue, tandis que l’épilogue nocturne se situe, dix ans plus tard, dans un autre quartier sensible, tout à fait à l’opposé de la ville, celui dit des Liserons. La famille Slimani a été pour Bertrand une seconde famille, peut-être sa vraie famille. Sa mère est mort...

La honte

— Qu’est-ce qu’il allait faire là-bas? Pourquoi l'a-t-il accompagné? — Parce que c'était mon frère. — Je sais. Nous le savons. Et nous savons aussi que votre mari avait reçu un appel de lui la veille au soir. Un échange très bref, qu’il vous cache, dites-vous. Qu’il prend soin de vous cacher. Sans qu’avant cela, il y en ait eu un seul autre depuis trois ans. — Si je l’avais su, vous pouvez croire qu’il ne serait pas ressorti, cette nuit-là. Vous pensez que je mens? — Bien sûr que non. Mais j’essaie de comprendre. Vous êtes sans nouvelles de votre frère depuis trois ans. Et puis, un beau soir, celui-ci appelle votre mari, ils ont un échange très bref, et le lendemain soir, sans qu’il vous en dise rien, votre mari l’accompagne à ce rendez-vous, dont l’un ni l’autre ne devaient revenir. Pourquoi, selon vous? — Parce que Walid était mon frère. Et parce que Walid et Bertrand se connaissaient depuis les années de collège. Et que c'était par lui, par Walid, que nous nous sommes re...