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Articles

Sériel (1-11)

1 - À côté de musiques conçues pour être écoutées par des gens assis, d’autres sont conçues depuis toujours pour faire danser, aussi bien l’aristocratie viennoise, si on songe aux valses de Johann Strauss, que le bon peuple comme celui des bals d’Hussein-Dey. Une troisième fonction dont seuls les spécialistes semblent garder la mémoire: celle des musiques conçues pour être jouées par des amateurs, en famille, entre amis, dans les salons. Catégorie abondamment illustrée par Mozart.  2 - La maison de Castellane que j'évoque dans Gisèle (dans Mon cœur qui bat ) a bien existé au fond de son parc, et il est vrai que j’y ai passé un mois d’août avec mes parents et ma petite sœur quand j’avais dix ans. L’ai-je revue à l’occasion des brefs passages que j’ai faits à Castellane pendant ma vie d’adulte? Je n’en suis pas certain. Et existe-t-elle encore? Il faudrait que j’aille vérifier. Le fait est qu’elle a continué d’exister dans mon souvenir, sans doute dans mes rêves. Avec une insistance...

Le mi-dire de Hugo et Baudelaire

J’ai lu Les Fleurs du mal quand j'étais très jeune. Pas toutes les Fleurs du mal mais dans Les Fleurs du mal quelques textes qui me fascinaient et que je relisais jusqu’à les savoir par cœur. La Servante au grand cœur occupait, dans ce petit nombre, une place de choix. Et la lecture que j’en faisais alors est restée celle que je fais aujourd'hui encore. À une nuance près, mais très paradoxale. On a souvent qualifié le poème en question de “romanesque”, et en effet j’avais le sentiment de lire un chapitre d’un roman de Zola, d'être plongé dans un imaginaire plein de délices décadents, proche de celui que je devais reconnaître, quelques années plus tard, dans les nouvelles de Barbey d’Aurevilly. L’histoire qu’il racontait — ou qu’il évoquait seulement, sans tout nous dire, ce qui lui donnait encore plus de force — m'intéressait au moins autant que la beauté déchirante des vers. Or, que disait-elle? Dans mon esprit, il ne faisait pas de doute qu’il s’agissait d’un dand...

Kyïv

J’ai transformé l’appartement en nursery. Je garde trois bébés, les trois derniers. J’attends d’un jour à l’autre que Bohdan me donne le signal du départ. Bohdan est le frère d’Andriy qui est parti au combat, j’ignore dans quelle zone, Bohdan le sait sans doute mais il ne veut pas me le dire, à moins qu’Andriy soit déjà mort, je ne veux pas le croire, il m’arrive de le voir en rêve, je reçois encore des lettres de lui, la dernière date d’une dizaine de jours, mais Bohdan pourrait l’avoir écrite, ils ont la même écriture, ils se ressemblent tellement. J’ai la chance d’avoir un balcon assez grand, Bohdan a fixé un grillage sur la barrière de protection, si bien que les bébés peuvent y jouer, je laisse ouverte la porte-fenêtre et ainsi les deux plus grands peuvent entrer et sortir à quatre pattes, tandis que je garde aux bras la petite Anastasiya qui pleure beaucoup, et moi aussi je profite de cette ouverture sur la ville, sur les toits et les clochers de la ville qui chante et qui bavard...

Des "petites histoires" en poésie

Il y a une matière ou un genre de la poésie qu’on appelle le lyrisme. Encore que le terme soit difficile à définir, on voit bien que Villon et Verlaine, par exemple, dans notre langue, ont atteint les sommets du lyrisme. Et c’est presque toujours à cette matière ou à ce genre qu’on pense d’abord quand on parle de poésie. Il en est pourtant une autre à laquelle on ne pense pas d’abord et dont on ne parle jamais, comme si une forme d’interdit pesait sur elle (ou sur lui), c’est le récit. La poésie a (eu) aussi pour fonction de raconter des histoires. Et je ne pense pas ici aux “grandes histoires”, aux légendes, aux épopées, que racontaient les poésies antiques et médiévales, je pense aux “petites histoires” que la poésie moderne a racontées, disons depuis le 19e siècle. On se souvient des premiers vers de la Légende de la nonne , de Victor Hugo, que Georges Brassens a si joliment mis en chanson: Venez, vous dont l’œil étincelle, Pour entendre une histoire encor, Approchez : je vous dirai...

Poèmes en Chansons

J'ouvre ici une liste qui reste en construction. Elle concerne les poèmes de langue française adaptés en chansons. Je parle de chansons populaires, et non pas de ce qu’on appelle la “mélodie française”, genre qui relève de la musique classique. Je construis cette liste à l’aide de l’IA (Gemini), ce qui signifie qu’elle contient très probablement des erreurs. Je l’ouvre à ce jour avec 71 lignes. Beaucoup restent à ajouter. Je vous invite à mettre en commentaires vos suggestions, qu’il s’agisse d’ajouts ou de corrections. Je compte aligner aussi certaines remarques que m’inspire cette liste. N’hésitez pas à me faire connaître les vôtres, toujours en commentaires, sur cette page plutôt qu’ailleurs. Nous disposerons ainsi d’un historique du projet. Le but est de construire un outil qui pourra être utile aux amateurs ainsi qu’aux étudiants, et peut-être même aux chercheurs. Et, bien sûr, ne manquez pas d'y revenir pour constater l’avancée des travaux. La liste _____________ 1 - L...

Ghislain Reger

Ghislain Reger me donnait rendez-vous, le soir, au bar de l’hôtel Westminster, sur la Promenade des Anglais. Souvent, j’avais passé l’après-midi dans la partie sud de la ville, à travailler à la bibliothèque Dubouchage ou dans des cafés où j’avais mes habitudes, et ensuite, quand nous avions quitté le Westminster, et après que nous nous soyons attardés un long moment encore sur la Promenade des Anglais, à marcher dans la nuit, en devisant côte à côte, il fallait que je retourne chez moi, tout à fait à l’opposé de la ville. Je tournais le dos à la mer pour gravir les avenues qui s'éloignent en direction des quartiers nord, ce qui revenait à traverser la ville de part en part. Je m’en allais en tramway par l’avenue Jean Médecin, puis par l’avenue Malaussena, puis par l’avenue Borriglione, enfin je m’engageais à pied dans l’avenue Cyrille Besset qui tourne et qui s'élève dans la nuit, comme si elle devait rejoindre un lieu magique où se tiendrait un bal, avec une estrade en bois s...

Pour une langue créole ?

Jean-Luc Mélenchon veut débaptiser le français pour l’intituler "langue créole". Je passerai sur les accents haineux que contient son article, qui sont dans sa manière, et qui suffisent à disqualifier sa proposition. Je note plutôt que des socio-linguistes universitaires (payés par l’université de leur pays, pas un autre) volent déjà à son secours. Rien d’étonnant à cela puisque ceux-ci lui préparent le terrain depuis plusieurs décennies, exerçant leur influence délétère sur la Commission des programmes et sur toute la hiérarchie de l'institution scolaire, dans le but qu’on renonce à enseigner la langue. Je voudrais répondre sur le fond. En déclarant d’abord que la linguistique n’a rien à voir dans cette affaire. Qu’elle n’a rien à répondre à l'idée baroque du tribun. Qu’il ne lui appartient pas de la réfuter, dans la mesure où il ne lui revient pas de dire ce qui est bien d’une langue (ici, le français) ou ce qui n’en est pas. Tout ce que peut dire la linguistique c’...