Mon professeur de violon s’appelait Madame Baudier (je crois que je n’ai jamais su son prénom). Elle habitait une petite maison niçoise, avec un jardin, au sommet de la colline Saint-Philippe, à l’emplacement de l’actuelle faculté de droit, et elle était calviniste. Elle fréquentait l'église baptiste de la rue Vernier et, un jour, elle m’a invité à jouer du violon en duo avec elle pendant un office.
Plus tard, quand j’ai abandonné l'étude du violon, je me suis passionné pour l’œuvre de Francis Ponge dont le hasard voulait qu’il fût issu d’une famille calviniste, lui aussi, et, dans les mêmes années, je me suis passionné pour le piano de Glenn Gould, qui était issu d’une famille presbytérienne, c’est-à-dire calviniste, lui aussi.
Et depuis, je dis toujours que je suis un catholique à tendance calviniste. Non pas vraiment “le dernier puritain” mais presque.
Très tôt, je me suis intéressé au jazz. J’ai créé un petit groupe d’amateurs de jazz, au lycée du Parc Impérial, quand j’avais quinze ans. Et c’est comme critique de jazz que j’ai collaboré au Patriote Côte d’Azur, organe du Parti Communiste, quand j’en ai eu dix-neuf.
Pour faire le lien entre Bach et le rhythm and blues, il y a l’orgue Hammond sorti tout droit des églises presbytériennes et baptistes. J’ai souvent un peu de mal avec la musique religieuse dans les églises catholiques. Je rêve d’y entendre du gospel song, ou, à défaut, le simple chant des psaumes de la tradition huguenote, raison pour laquelle il m’arrive de fréquenter le temple et de m'y sentir chez moi.
Là où l’orgue se transporte, là où il se fait entendre, c’est lui.
Dans les églises catholiques, à la fin de grand-messe, le dimanche, il y a ce moment où les prêtres et les enfants de chœur descendent en procession l'allée centrale en direction de la sortie, et que la porte à deux battants s’ouvre toute grande devant eux, ce qui fait entrer un rayon de soleil qui traverse la nef dans toute sa longueur, jusqu’à l'autel resté seul, et l’orgue alors peut donner sa mesure, l'organiste caché peut faire trembler les murs de ses accords puissants.
Le prêtre célébrant marche en tête de la procession dans ses habits liturgiques, et dehors, sur la place Rossetti, il y a tous les voisins et amis en cercle qui vous attendent, avec leurs filets à provisions, avec des boîtes à gâteaux pour le dessert de midi. Et, bien sûr, la Toccata et fugue en re mineur de J.-S. Bach est l’œuvre qui évoque le mieux ce moment ineffable, encore que son auteur ne fut pas catholique, et que je ne me souviens pas de l’avoir jamais entendue en pareil lieu ni pareille circonstance. Mais je ne suis pas loin de penser que, quelle que soit la partition, quel que soit le talent d'improvisateur de l’organiste caché, l’orgue y suffit.
C’est lui que l’on entend. C’est lui qu’on reconnaît. Sa machine, ses touches, ses pédales, ses tuyaux. Tel un gros crapaud qui coasse dans la nuit.
Remontent ou descendent ? Dans mon souvenir l'officiant et les enfants de chœur quittent la nef par l'autre bout, vers la sacristie tandis que les fidèles descendent vers la porte centrale. Mais tu connais mieux que moi les pratiques contemporaines
RépondreSupprimerJ’avais écrit “remontent”, je corrige en “descendent”, c’est en effet plus clair. Merci donc pour ta remarque. Pour autant, à ceci près, je confirme que ma description est bien conforme à mes expériences récentes. Ce qui n’empêche que ton scénario me dit quelque chose. Il me semble avoir vu cela, moi aussi, en effet, cette sortie des prêtres et des enfants de chœur par le fond de l'église, en direction de la sacristie, mais l’image est lointaine et floue. Est-ce que les sorties auxquelles j’ai assisté, ces dernières années, sont spécifiques des grand-messes? Ce n’est pas impossible. S’agit-il d’un rituel nouveau? Ce n’est pas impossible non plus. Il faudrait que de plus instruits que nous répondent à ces questions.
SupprimerIl n’y a pas de règles rituelles à ce sujet. La messe catholique se termine par « Allez dans la paix du Christ » (le prêtre célébrant) auquel les fidèles répondent : « Nous rendons grâce à Dieu ». Ensuite, les fidèles entonnent un chant dit « d’envoi » ou bien c’est l’orgue qui conclut la célébration. Le prêtre et ses assistants retournent alors vers la sacristie, ou bien le prêtre va saluer ses paroissiens à la sortie (pratique parfois controversée quand il garde ses habits liturgiques). Pour la messe, la procession avec la croix n’a lieu qu’au début.
RépondreSupprimerMerci. Donc mon crucifix est en trop. Il faut que je le mentionne mais peut-être sans le supprimer. J'y réfléchis
SupprimerJ'ai corrigé
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