J’ai toujours été fasciné par les accompagnateurs et les choristes. Maintenant, je sais pourquoi. Fasciné et puissamment ému. Maintenant, je sais pourquoi. Au premier rang, depuis l’enfance, par les choristes qui répondent à Ray Charles sur What’d I Say?
JF Jacomino, dans l’un de ses commentaires, nous propose un lien documentaire sur L’orgue Hammond. Cette ressource est relative à des échanges qui ont lieu sur notre WhatsApp Connect que nous vous invitons à rejoindre.
À l’époque, nous ne savions pas leurs noms, nous n’avions pas le Web et encore moins l’IA pour les interroger. Hors les petits cercles de spécialistes, ces artistes étaient des anonymes.
J’ai demandé à ChatGPT de me décrire l’introduction de What'd I Say que Ray Charles joue au piano. Il propose ceci: “C’est un motif rythmique et hypnotique joué au piano électrique Wurlitzer, construit sur un ostinato de douze mesures au groove syncopé. Ray Charles y martèle des accords brisés en croches, presque comme une percussion, créant une tension joyeuse et irrésistible qui annonce le feu à venir.”
Je trouve cela très bien. Je ne ne suis pas assez connaisseur pour juger si tout est exact, au plus précis, mais je prends. Et maintenant, poussez-vous, c’est à moi!
Nous sommes dans un supermarché, ma petite sœur et moi, accrochés au caddie poussé par maman. Dans les allées, entre les hauts rayonnages. Devant le supermarché, il y a le parking où nous avons laissé notre voiture. Où le soleil tape dur. Et, à l’intérieur, il y a la musique d’ambiance, celle qui plane au-dessus de vous, qu’on entend sans la voir. Composée de titres de tous genres, avec des choses bien indifférentes, bien guimauves, qu’on n'écoute pas. Et voilà que soudain, ce sont ces accords de piano, et bientôt ce sont les voix.
Alors, soudain, comme si la foudre l’avait frappée du haut du ciel, mais une foudre qui vous illumine sans vous tuer, qui vous nimbe de lumière, maman retient le caddie dans son élan, de ses deux bras, et elle dit: “Écoutez, les enfants!”
Je précise tout de suite que cette histoire est inventée, que rien de cela ne s’est jamais produit, ce qui n'empêche que, si la vérité existe, la vérité est là.
Maman arrête le caddie et, la tête baissée sous la musique, le visage tout près de nous, elle dit: “Écoutez, les enfants!”
Et elle nous dit que oui, écoutez bien, c’est moi qui chante ici, avec mes copines, Margie Hendricks, Darlene McCrea, Mable John. Nous étions un groupe, nous nous appelions les Raelettes. C'était en Amérique, avant que votre père vienne me chercher là-bas, dans les studios, qu’il m'enlève un beau jour pour me ramener à Paris.
Et quant à notre père, il aurait pu être de ces musiciens de Sempé, petit, affable, souriant (ce qu’il n'était pas), avec des lunettes de comptable (ce qu’il était), vêtu d’un beau costume noir et assis dans la fosse, où la caméra l’aurait filmé en train de jouer à la clarinette l’introduction de Lucevan le Stelle derrière un Beniamino Gigli debout, érigé devant le public comme le pistil d’une fleur, et prêt à faire entendre sa voix dans ce si bref et bouleversant morceau de bravoure.
Merci pour ces scènes vivantes de redécouverte éclectique de chefs-d’œuvre.
RépondreSupprimerChristian, ton attention s’est portée sur les chœurs derrière Ray Charles…C’est tout à fait justifié quand on analyse cette musique de près. C’est un moment décisif dans l’histoire de la Musique Noire américaine. On est ici en présence d’une idée révolutionnaire de Ray Charles qui sera reprise par un nombre incalculable d’artistes. Nous assistons à la naissance de la Soul Music. La musique de l’âme ! Ray Charles est en effet le premier à « oser » superposer à la musique profane qu’est le Blues », des chœurs directement issus du Gospel, la musique religieuse noire de l’époque aux USA. Cela a été un scandale retentissant ! Un de ses titres « Halleluyah I loved her so » symbolise à lui seul cette dualité entre le religieux et le profane qui a scandalisé les pratiquants. Ils considéraient le Blues comme la musique de Satan et Ray Charles en devenait le symbole…Il utilise le chœur comme un «riff ». C’est un va-et vient constant entre le soliste qui lance un appel et le chœur qui lui répond…Il est intéressant de faire un parallèle avec le Call and Respons que l’on retrouve dans les chants africains mais aussi dans la tradition des chants religieux du Moyen-Age…mais Ray Charles en a fait un style à part entière.
RépondreSupprimerTon commentaire tombe à point. Je voudrais parler de l’orgue dans le rhythm and blues où il semble directement importé du gospel, et donc des églises baptistes. À la fois un dévergondage, une “profanation” comme ont pu dire certains, mais aussi, à l’inverse, comme si quelque chose de la vieille tradition religieuse s’invitait dans les “mauvais lieux” pour faire entendre sa voix Je sais que tu es un très bon connaisseur du sujet, et si tu as quelques ressources numériques à me proposer, j’irai m’instruire bien volontiers. (Je pensais à ce thème, ce matin, en écrivant ma petite histoire et en écoutant une chanson que je mets en lien pour toi sur notre WhatsApp Connect. Tu la connais, bien sûr. Tu me diras si elle te parle. Je t’embrasse.)
SupprimerImpossible de copier ma réponse à ton commentaire sur l’orgue. Alors la voici : L’intégration de l’orgue dans la musique profane noire américaine, à l’image de l’intégration des chœurs, provient sans aucun doute de l’église. Le problème de la taille de l’instrument a été résolu par Laurens Hammond, dont le nom va devenir le symbole de l’orgue qui accompagnera toute l’histoire du Jazz. Voici un lien sur cette histoire passionnante :
RépondreSupprimerL'espace Commentaires refuse les liens hypertextes, même en html. C'est une limitation importante. On s'y fait
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