Elle était sortie de la brasserie.
Je voyais la vitre de la brasserie qu’elle avait quittée, et le groupe derrière la vitre réuni autour d’une table. Des visages de gens attablés derrière la vitre, et elle debout à l’extérieur qui parlait au téléphone.
Je montais le boulevard quand je l’ai vue, et deux ou trois visages du groupe derrière la vitre me regardaient, de loin, comme on regarde un étranger qui arrive, tandis que je montais et que mon regard était attiré par celle qui était sortie et qui téléphonait.
C'était le soir, il avait plu. Il pleuvait sans cesse sur Brest ce jour-là. Et l'intérieur de la brasserie était éclairé, si bien que ces visages que je voyais de loin étaient comme ceux d’acteurs de cinéma.
Un groupe de figurants qui pouvaient être sa famille. Ils s'étaient réunis, ils avaient déjeuné là, ils s'étaient attardés parce que dehors aussi bien il pleuvait. Le ciel était couvert, il faisait froid. On vendait des sapins sur la place du marché, il y avait un manège près de la gare dont la façade s’illuminait, des jeux de lumières colorées, et le soir d’automne était tombé plus vite que prévu.
Peut-être s’appelait-elle Barbara. Elle avait attendu longtemps, en souriant aux propos des autres autour d’elle. En hochant la tête. En riant aux enfants qui l’appelaient leur tante ou leur cousine, car il y avait parmi eux des enfants. Ils s'étaient retrouvés à l’approche de Noël, pour une fois qu’ils étaient tous réunis, et elle avait attendu en cherchant un prétexte pour les quitter, pas longtemps, juste le temps qu’il faudrait, et elle avait fini par dire qu’il fallait qu’ils l’excusent et elle était sortie.
Elle s'était levée parmi eux qui s'étaient écartés, poussant leurs chaises pour lui faire un passage, et elle était sortie. Peut-être en se levant avait-elle rougi. Peut-être pas. Et la conversation qu’elle avait maintenant au téléphone se prolongeait. Elle s’était couverte d’un manteau attrapé au dossier de sa chaise, elle en avait relevé le col et elle faisait le pied de grue devant la vitrine éclairée où les autres la regardaient sans deviner ce qu’elle disait, ni à qui elle parlait.
Elle se tournait pour éviter leurs regards. Elle a croisé le mien. Elle fumait une cigarette.
Superbe !
RépondreSupprimerJe vais le voler !
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