Le voyageur effectue la traversée seul à bord d’une felouque, puis, aussitôt qu’il découvre la plage, celle-ci lui paraît dangereusement étroite. Il tire son embarcation au sec, s'abrite entre deux rochers. Il doit reprendre des forces, demeurer quelques jours sur cette rive avant d’entreprendre l’ascension du mont à mi-pente duquel devrait s’enfouir le temple, ou les ruines du temple dont ses recherches dans les bibliothèques de plusieurs continents lui ont permis de deviner l’existence en ce lieu, et qu’il veut explorer. Mais la première nuit, il est assis dans le sable, éclairé par une lune pleine et léché par les vagues, avec au-dessus de lui le mont couvert d’une forêt épaisse, inextricable, agacé par les oiseaux, des tortues hautes comme des ânes, avisant de loin les frondaisons d'arbres dont les feuillages se balancent comme houppes à poudrer, réveillé quelquefois, quand le sommeil le prend, par un bruit insituable de cascade ou de fontaine.
Assez vite je me suis rendu compte qu’elles avaient peur de moi. Les infirmières, les filles de salle, les religieuses, mais aussi les médecins. Quand soudain, elles me rencontraient dans un couloir. L’hôpital est vaste comme une ville, composé de plusieurs bâtiments séparés par des jardins humides, avec des pigeons, des statues de marbre, des fontaines gelées, des bancs où des éclopés viennent s’asseoir, leurs cannes ou leurs béquilles entre les genoux, pour fumer des cigarettes avec ce qui leur reste de bouche et, la nuit, les couloirs sont déserts. Alors, quand elles me rencontraient, quand elles m’apercevaient de loin, au détour d’un couloir. Elles ne criaient pas, je ne peux pas dire qu’elles aient jamais crié, mais aussitôt elles faisaient demi-tour, ou comme si le film s'était soudain déroulé à l’envers. Elles disparaissaient au détour du couloir. Je me souviens de leurs signes de croix, de l'éclat des blouses blanches sur leurs jambes nues. Du claquement de leurs pas su...
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