J’ai compris que mon séjour se passerait
dans la banlieue. Une voiture m’attendait à la gare.
Piotr est assis à l’avant,
il donne des ordres au conducteur.
Nous parlons lui et moi en nous regardant dans le rétroviseur.
Nous traversons des quartiers anciens,
places monumentales que je reconnais
pour les avoir vues en photos. Il neige,
il se mit à neiger. Les ailes blanches des oiseaux
battaient dans le ciel des boulevards.
Des nuages noirs emplissent le ciel où flottent des ballons qu’on voit pilotés par des êtres appartenant à plusieurs espèces animales mais de formats plus importants, effrayants ou grotesques.
Échanges de tirs au laser.
Plutôt rituels. La nuit vient trop vite.
La banlieue, au contraire, apparaît dans un pâle
soleil d’hiver. Ma chambre au premier étage
ouvre sur une esplanade où est installé un cirque.
Je découvre, sous ma fenêtre, son chapiteau et ses caravanes
peintes de couleurs vives. Je respire l’odeur
des fauves, je les entends se plaindre
dans la nuit, raconter leurs histoires.
Occupé la plupart du temps à jouer aux échecs
avec des inconnus dans un café où je prends
mes repas. Puis, les cours de linguistique
que je donne dans une salle des festins
équipée d’un tableau noir. Mes étudiants gardent la tête baissée sur les cahiers où ils écrivent. Je ne connais pas leurs noms, ni le son de leurs voix. Je ne suis pas certain de leur compréhension. Ils repartent
en tramway. Ils regagnent les écoles où ils enseignent à lire à des enfants. Certains, arrivés au port, s’embarquent pour d'autres continents. De celui qui était le plus timide mais aussi le plus studieux, nous apprendrons qu’il a participé aux émeutes qui ont entraîné la chute de l’ancien président dans son lointain pays, émeutes dont il nous arrive de voir des images à la télévision sans pouvoir y intervenir, sans pouvoir endiguer leur violence, et qu’il occupe à présent un poste important auprès de celui qui l’a remplacé, mais pour combien de temps encore avant que la ville s'embrase de nouveau, nous n'osons y songer.
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La première version de ce texte date des années 2000-2010. Je me revois en train de l'écrire dans mon bureau de l'école du Château. Puis c'est à partir de lui que j'ai écrit Tendres guerriers, au début des années 2020, et c'est lui à présent que je reprends dans Le bout du monde, à partir du chapitre 22, La Cité Aristote.
Beaucoup de corrections. Puis j'enregistre la version audio.
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