Quand vous avez quitté le groupe, quand enfin vous dormez dans votre lit, vous savez que le café du coin de la rue reste ouvert et éclairé, et qu’il s’y trouve encore quelques individus semblables à vous, aussi seuls, aussi perdus, qui regardent la pluie. Ils veillent sur votre sommeil, comme à d’autres moments vous veillez sur le leur. Les hommes se tiennent debout derrière la porte vitrée, les mains dans les poches, ou même parfois à l’extérieur, quand la pluie n’est pas trop violente, quand le jour commence à se lever derrière les grands immeubles. Et bien sûr ces nuits ne sont pas toutes les nuits, elles ne sont même qu’un petit nombre de nuits parmi les autres, mais ce sont celles dont je me souviens. À partir d’un certain moment de ma vie, les autres nuits et les jours entre ces nuits n’ont plus compté. Le soleil m’a fait horreur. Il ne m’est plus resté que ces nuits pluvieuses et leurs petits matins. Et je crois pouvoir affirmer qu'il en fut de même, et qu’il en est de même aujourd’hui encore pour les autres membres de notre petit groupe. Même si j’ignore leurs noms.
(Automne 2019)
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